Intentions et plan d’actions

pour la transmission de savoir-faire et la formation

dans les métiers de la construction en terre crue

Le texte ci-dessous est la version en ligne du document publié par la Confédération de la construction en terre crue le 16 octobre 2024. Il est le fruit de plusieurs années d’enquête et de travail collectif entre ses associations membres de la Confédération au sein de l’atelier « Transmission de savoir-faire et formation ».

Pour télécharger la version . pdf du document, cliquez sur ce lien. ou sur l’image ci-contre.

Introduction

En octobre 2024, la Confédération a publié le document « Intentions et plan d’actions pour la transmission de savoir-faire et la formation dans les métiers de la construction en terre crue », qui actualise sa déclaration intention initialement publiée en 2021 et intègre les résultats du diagnostic Terre de Métiers finalisé en 2023.

Ce document se donne deux objectifs principaux :

  • Expliciter les besoins de transmission de savoir-faire dans les métiers concernés par la construction en terre crue, en construction neuve comme en réhabilitation du patrimoine existant sur le territoire hexagonal.
  • Établir un plan d’actions pour répondre à ces attentes de terrain, dans les domaines de la transmission et de la reconnaissance des savoir-faire.

Ainsi, ce document s’adresse autant au secteur du bâtiment qu’à celui de la formation initiale et continue, à tous les niveaux d’enseignement. Les organisations et institutions dans ces deux domaines sont invitées à se saisir de ces propositions pour développer leur politique de transmission de savoir-faire dans les métiers de la construction en terre crue.

Note : parmi les métiers concernés par la construction en terre crue, nous incluons :
– les maîtres d’ouvrages et assistants à maîtrise d’ouvrage ;
– les métiers de la maîtrise d’œuvre : architectes, ingénieurs des bureaux d’études techniques en bâtiment spécialisés dans la structure, la thermique, l’acoustique, l’évaluation environnementale, économistes ;
– les contrôleurs techniques et les assureurs ;
– les métiers de la mise en œuvre et de la maintenance, construisant en terre crue ou travaillant en interface avec un ouvrage en terre crue, à tous les niveaux de responsabilité.

Enjeux primordiaux

A l’heure où une transformation profonde du secteur du bâtiment et de ses modes de production devient incontournable pour diminuer drastiquement ses impacts environnementaux, les pratiques de construction en terre crue suscitent un intérêt croissant de toutes parts.

Cet élan s’incarne aujourd’hui dans des politiques publiques de plus en plus ambitieuses, à l’image de la nouvelle réglementation environnementale RE2020 qui incite à un recours plus volontariste aux matières locales dans la perspective de réduire l’énergie grise des bâtiments. Dans le cas de la terre crue, la mise à l’agenda des problématiques urbaines liées au devenir des terres excavées vient également alimenter cette dynamique.

Alors que cet engouement contemporain se traduit par une multiplication d’appels d’offre pour des marchés de construction intégrant des éléments de construction en terre crue, nombre d’entre eux restent encore infructueux. Par ailleurs, ce virage environnemental intervient dans un secteur du bâtiment déjà « en tension » du fait d’un déficit quantitatif de travailleur.euses qualifié.es qui s’explique en grande partie par un rejet des conditions de travail dans ce secteur.

De ce contexte émerge ainsi une demande quantitative de formation à la construction en terre crue vis-à-vis duquel la Confédération terre crue se positionne pour apporter des réponses avant tout qualitatives.

S’il s’agit d’abord de prévenir des choix de conception et de mise en œuvre qui peuvent conduire à des pathologies et de futurs contre-exemples, les urgences actuelles exigent de ne laisser de côté aucune des dimensions en jeu dans l’acte de bâtir et d’habiter – qu’elles soient d’ordre technique, économique, écologique et/ou social. Dans cette perspective, la Confédération met en avant 5 enjeux primordiaux :

État des lieux et diagnostic

Entre juin 2022 et juin 2023, la Confédération terre crue a mené dans le cadre du plan de relance France 2030 un diagnostic de l’offre de formation au regard des besoins de compétences dans les métiers de la construction en terre crue. Intitulé « Terre de Métiers, ce diagnostic avait deux objectifs :

  • Identifier les problématiques de terrain liées à un manque de savoir-faire, sur la base d’études de cas de projets et de retours d’expérience ;
  • Dresser un état des lieux des modalités d’apprentissage.

Cette partie présente les résultats de cette étude sous une forme synthétique avant de présenter le plan d’actions qui a été formulé à partir du croisement de ces deux regards. Pour plus de détails concernant le diagnostic, nous renvoyons vers la synthèse et le rapport, accessibles en ligne.

1 – Analyse des problématiques et des besoins depuis les projets de construction

On observe une multitude de projets qui n’aboutissent pas ou qui constituent des contre-exemples qui auraient pourtant pu être désamorcés dès l’avant-projet.

Ces cas s’expliquent en grande partie par des choix techniques manifestement inadaptés au contexte du projet et aux ressources du site : caractéristiques des gisements de terre, cultures constructives locales et professionnel.les présents sur le territoire. Cette programmation hors-sol peut susciter des surcoûts importants.

Il arrive fréquemment de rencontrer des choix de conception contraires au Guide des bonnes pratiques entraînant des projets complexes voire impossible à réaliser, des surcoûts et des potentielles malfaçons.

Les phases de conception/prescription négligent encore trop le besoin d’une approche globale du bâtiment et les interfaces techniques et organisationnelles liées aux spécificités de la terre crue et à ses contraintes de mise en oeuvre.

En tant que techniques « non courantes » au sens de l’AQC (Agence Qualité Construction), les techniques de construction en terre crue déstabilisent les cultures professionnelles de l’ingénierie.

Dans ce contexte, il arrive souvent que des méthodologies de justification et de contrôle particulièrement exigeantes ou inadaptées soient transposées à des ouvrages en terre crue – en particulier lorsque les choix de conception s’écartent du Guide des bonnes pratiques.

Nombre d’abandon dans de projets dessinés en terre crue ont pour cause l’absence de réponse en phase de consultation.

Ces abandons s’expliquent par une mauvaise conception du projet (système constructif inutilement complexe, technique inadaptée aux savoir-faire locaux) et/ou par l’absence d’entreprises compétentes sur le territoire, c’est-à-dire des entreprises ayant une capacité de répondre et une vision intégrant les aspects techniques, logistiques, économiques et sociaux qui entrent dans la mise en oeuvre.

A partir des études de cas et des entretiens réalisés pour Terre de Métiers, il ressort ainsi globalement que la construction en terre crue ne nécessite pas d’émergence de nouveaux métiers mais plutôt une transformation généralisée des pratiques professionnelles existantes dans tous les métiers concernés par la conception, le contrôle et la réalisation d’un ouvrage en terre crue. Si un seul des maillons fait défaut dans la chaîne de valeur d’un bâtiment, le projet prend le risque d’une malfaçon ou d’un abandon.

Trois éléments structurent ce besoin de transformation :

La construction en terre crue requiert une adaptation des pratiques professionnelles, avec des savoirs et savoir-faire qui ont pour tronc commun la connaissance des matériaux et de leur comportement, sur la base notamment du patrimoine bâti. Chaque professionnel.le s’approprie ces connaissances sous un angle différent en fonction de ses responsabilités et des modalités de mise en œuvre de la terre crue aux différentes phases du projet de construction. De ce point de vue, il manque aujourd’hui des professionnel.les compétent.es à tous les niveaux, et en particulier pour les métiers de la maîtrise d’œuvre et du contrôl

Les connaissances techniques évoquées ci-dessus sont indissociables d’une approche à la fois située du bâtiment et intégrant toutes les dimensions de l’acte de bâtir.

Si une démarche collective de résolution de problèmes est nécessaire dans tout projet de construction, elle est d’autant plus fondamentale lorsqu’il s’agit de construire en terre crue. Sans remettre en question les spécificités respectives des différents métiers, une coopération renforcée entre les intervenant.es s’impose tout au long de la vie du projet

2 – État des lieux des modalités d’apprentissage

Le diagnostic Terre de Métiers a procédé à une enquête par entretiens et questionnaires auprès des apprenant.es, praticien.nes et formateur.ices ainsi qu’un recensement des modalités d’apprentissage et de l’offre de formation. Les conclusions en sont restituées ci-dessous.

Plan d’actions

Afin de répondre à ce diagnostic et aux enjeux prioritaires formulés plus haut, la Confédération terre crue a dressé un plan d’actions qui se déploie dans trois grands domaines :

  • Les moyens de diffusion de la culture commune et de transmission de savoirs et de savoir-faire pour lesquels le diagnostic Terre de Métiers a mis en évidence des manques importants. De ce point de vue, nous appelons à des actions dans les domaines suivants :
  • Les moyens de validation des savoir-faire, incluant la mise en place d’une certification entre pairs et une harmonisation des référentiels de compétences et de certification existants et à créer, sur la base d’un état des lieux à ce sujet.. Il s’agit notamment de fonder les documents-cadre de la validation des savoir-fair autour de la culture commune et d’une obligation de résultat. La Confédération terre crue se positionne comme actrice et interlocutrice de référence dans ce domaine.
  • Les moyens d’enquête, car si le diagnostic Terre de Métiers a permis de rendre visible certaines de ces transformations, il a également mis en évidence des pistes d’enquête en sciences sociales, à approfondir pour ajuster nos actions en conséquence.

La mise en œuvre de nos intentions et du plan d’action pour la transmission de savoir-faire et la formation aux métiers de la construction en terre crue tels qu’ils sont formulés dans ce document repose sur des actions coordonnées entre la Confédération terre crue, les organismes, institutions et acteur.ices dans les secteurs du bâtiment et de la formation.

Toutes ces composantes sont invitées à se saisir de nos propositions pour développer leur politique de transmission de savoir-faire et de formation à toutes les échelles et pour tous les métiers concernées par ce processus.

Pour échanger avec la Confédération terre crue à ce sujet, nous vous invitons à nous écrire à l’adresse contact@conf-terrecrue.org.

A. Sensibiliser tous les publics à la construction en terre crue en diffusant la culture commune

Pour donner à voir et transmettre les logiques inhérentes à la construction en terre crue au plus grand nombre, et plus prioritairement les acteur.ices de la commande, de la prescription et du contrôle.

B. Déployer une offre de formation initiale et continue
à la hauteur des besoins de terrain

C. Prioriser les modalités de transmission qui concourent à la coopération entre les métiers et à l’apprentissage en situations réelles

D. Structurer la reconnaissance des savoir-faire

E. Mieux appréhender les changements attendus dans les mondes du travail et de l’apprentissage liés à la construction en terre crue